Les talibans de la science
les oeuvres inquisitoriales de Citizen4Science
Comme en écho de
mon dernier article sur "Le miroir de la mauvaise foi", je ne peux m'empêcher
de réagir à cette mise en exergue par le Journal du Dimanche - JDD (encore lui... qui doit aussi se sentir particulièrement visé par l'article du sociologue
Laurent Mucchielli sur "l'inquiétant déclin du journalisme" ) de la lettre
ouverte de l'association Citizen4Sciences (voir "INFO JDD. Covid-19 : le CNRS appelé à sanctionner le sociologue antivax Laurent Mucchielli") qui n'est ni plus ni moins
qu'une dénonciation en forme de lynchage médiatique des travaux
du chercheur du CNRS, accusé en quelque sorte d'hérésie pour oser élever une voix contre ce qui ressemble fort à une défense de "l'orthodoxie scientifique" (baptisé du nom de « consensus scientifique" ).
Notons comment Citizen4Science en appelle aux lumières de Pasteur
pour souhaiter la bienvenue sur son site :
"la Science n'a pas de patrie parce que le savoir est le patrimoine de l'humanité , le flambeau qui éclaire le monde"
Cependant à la lecture de leur lettre ouverte, et de ce déchaînement de haine, un esprit critique, ne peut que s'interroger. Citizen4Science se prendrait-elle comme une sorte de "Congrégation pour
la doctrine de la foi [scientifique]" (dénomination plus soft de la Sainte Inquisition à partir
de 1965) ?
Il semble bien en effet, que sur la question sociétale de la Pandémie, aucune voix discordante ne puisse se faire
entendre ; comme si la science était gage de vérité (unique) et exempte de tout
péché (et en particulier celui d'être contaminé par les représentations sociales ) selon l'idéologie communément admise que les faits parleraient d'eux-mêmes ou que les scientifiques seraient des porte-parole parfaitement neutres... Les philosophes ont depuis longtemps mis en évidence
la faiblesse d'une telle affirmation de "neutralité" du point de vue scientifique. Bruno Latour a pu montrer dans "Guerre
et Paix des microbes", comment les travaux de Pasteur (et leur postérité en forme de "success story") ne pouvaient se comprendre par le fait de la seule "découverte scientifique",
mais plus certainement par l'intrication des réseaux de la science et de
la politique (théorie dite de "l'acteur réseau"). Latour nous dépeint Pasteur non comme un pur héros de la science qui dore les blasons des images d'Epinal, mais plutôt comme un habile sociologue
et homme politique, qui ouvre l'accès au monde social à un nouvel acteur ( le microbe ) (comme l'ont fait avec le coronavirus, de nos
jours les gouvernants politiques avec la complicité des instances de la
science comme le montre bien les travaux (à mettre aussi à l'index ?) de Barbara Stiegler sur "De la
démocratie en Pandémie".
Bref la chasse aux sorcières
est déclarée, et Citizen4Science se veut être là le bras armé de la "Sainte église scientifique" dans la ligne de l'Express et de sa
littérature tissée de "mauvaise foi". Il s'agit bien là de définir et protéger la
"vraie science" contre les suppôts du diable, ceux-là mêmes qui comme Laurent Mucchielli sèment le
doute et posent des questions qui dérangent, simplement parce qu'ils posent un
autre regard sur le monde dont on sait qu'il structure toutes les
hypothèses y compris les "connaissances" et le "savoir".
Il s'agit d'invalider, de briser l'idée qu'il pourrait y avoir une autre version de scientifique de la "réalité" éminemment sociale dans laquelle nous sommes pris. Alors Citizen4Science soutient si la croisade de médias comme Le Monde, (voir "Covid-19 : derrière les « 30 000 médecins » de Coordination santé libre, une galaxie de rassuristes, naturopathes et citoyens en colère ) prêt à remettre en cause la légitimité de ceux qui se revendiquent aussi de la recherche scientifique pour porter un autre diagnostic sur le traitement médical et politique de la pandémie. Il est en fait bien difficile de séparer le médical du politique, au point qu'on se demande si le montre depuis le début le jeu trouble du pouvoir avec la mise en place du Comité Scientifique (un de plus ...) pour "l'éclairer " (jusqu'à un certain point, celui où il ne faudrait pas inverser les prérogatives du pouvoir politique)
On
pourrait croire (et encore...) à cette pureté de la science si le discours à prétention scientifique ne s'était lui même pas pris les pieds dans le tapis des intérêts
politico-économiques avec l'affaire de la publication dans le Lancet d'une fameuse étude sur l'hydroxychloroquine, dont les auteurs ont été pris la main dans le
sac de la manipulation « hasardeuse" des données à l'origine de
leur publication.
Non Galaad, le chevalier blanc ne siège pas à la Table Ronde de Citizen4Science.
PS : on lira aussi avec intérêt le propre article en forme de droit de réponse de Laurent Mucchielli sur son blog : " Sociologues ou gardiens de la doxa ? Qui entache la réputation de notre discipline ? "
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